FISTON 2 A 18 ANS
Publié le 27 Janvier 2012
Il est né quand les mimosas fleurissent et toute ma vie cette fleur sera liée au jeudi soir où je l'ai serré pour la première fois dans mes bras. Samedi dernier, le bouquet de Jules m'a bien évidemment fait penser au jour de sa naissance.
Ses affaires, autres que des vêtements, passent régulièrement dans la machine à laver le linge. Dimanche, j'y ai retrouvé un stylo 4 couleurs tout neuf qui avait fait un programme complet à 30°. La mine bleue a coulé sur toutes ses fringues.... heureusement pour la plupart foncées. Au fond d'une poche, j'ai aussi trouvé une pièce de monnaie, un briquet qui est parti sans attendre à la poubelle et un vieux trombone tordu.
Lundi, il a oublié ses lunettes sur son bureau avant de repartir à l'internat. Et, dans la journée, il a perdu une lentille de contact. Il a donc dû revenir à la maison pour récupérer ses lunettes. Et une nouvelle paire de lentilles. Trois heures aller et retour en transports en commun. Mais au retour il a oublié le portable de sa soeur dans le bus. Le portable de sa soeur ? Ben oui, le sien, il l'avait cassé la semaine précédente.
Mardi, il m'appelle pour me dire qu'il voudrait avoir la possibilité de faire trois voyages dans sa vie : Kingston, Jamaïque, berceau du reggae ; Addis-Abeba, Ethiopie, berceau de l'humanité ; Jérusalem, Israel, berceau des religions. "C'est très important pour moi" ajoute-t-il. J'en reste coite et en même temps admirative devant tant de sagesse.
Mercredi, je reçois par la poste une revue à laquelle il est abonné. En effet, il dévore Le Magazine Littéraire comme d'autres apprécient Gala ou Voici, sur le canapé du salon ou le soir avant de s'endormir... Il aime aussi Flaubert et Vian, mais il est plus réservé en ce qui concerne Ionesco. Il lit Steinbeck en V.O. mais ne rate jamais non plus un numéro du Journal de Mickey : "C'est bourré d'informations qui présentent un grand intérêt" dit-il.
Jeudi, nous recevons son bulletin du premier semestre. Il est à l'image des remarques que l'on y retrouve, les mêmes depuis... toujours : talentueux, prometteur, réfléchi, frôlant souvent l'excellence mais.... avec lui, il y a toujours un mais... Parfois, je me demande s'il est vraiment fait pour notre monde. Trop de contraintes, trop de tabous, trop de carcans, trop d'intolérance, trop de clichés, trop de choses surfaites. Pas assez d'humanité, pas assez d'amour, pas assez d'humour, pas assez de liberté, pas assez de respect, pas assez d'essentiel.
Aujourd'hui vendredi, il a 18 ans. Nous avons passé une délicieuse soirée en famille tous les six. Nous sommes sortis en toute simplicité mais l'ambiance était de mise, en partie grâce à lui. Il a soufflé une belle bougie posée sur une île flottante. "Pas la place d'en mettre 18" a dit le restaurateur ! Puis il est allé rejoindre ses amis en ville pour continuer la fiesta jusqu'au bout de la nuit.
On ne fête pas sa majorité tous les jours, n'est-ce pas ?
Un an déjà s'est écoulé depuis ce texte.
Et moi je n'ai pas vu le temps passer...